

Dans un monde où le train est une source d'inspiration, le temps un trouble anxieux et l'expérience une volonté de devenir plus juste, Julien endosse sa guitare et empoche son harmonica en direction de sons salutaires. La distance importe peu, les questions se posent en prose et les réponses font vibrer une inconsciente sincérité qui amène à la rencontre des styles. C'est à travers le reflet des autres que Julien s'est découvert éparpillé, pour se reconstituer Sinus Georges. Mais bien qu'il semble se suffire à lui même, la découverte lui apprend tous les jours que la diversité découle du partage. C'est pourquoi, ses débuts acoustiques et country-manouches sont devenus des morceaux enjolivés de cuivres, de cordes, de percus et de platines aux sons jazzy, rock et hip-hop. Ses chansons sont une succession de réflexions personnelles, de sentiments ou de souvenirs les uns très jolis, les autres plus amers. Pour le reste, pas question de rancune mais d'exaltation avec l'humour de Sansévérino, la gaieté de Georges Brassens et la simplicité de Jack Johnson. On se laisse doucement envouter par cette facilité naturelle qu'a ce jeune artiste à nous raisonner avec si peu.

Je ne veux pas suivre le courant / Et je me bats singulièrement / Oui je décoche des flèches en faveur / De ce qu'il y a en moi de serviteur / Je veux me dresser, lever la tête / Être mon propre roi mon propre prophète . Ainsi va le refrain de Tenter l'Atout , chanson titre du deuxième album de Samir Barris. Profession de foi, rêve d'un soi libéré. Par une "chanson française" libérée elle aussi.
Chanson qui fait mouche. Samir est sélectionné Découverte Chanson au Printemps de Bourges 2010, programmé aux prestigieuses Nuits Botanqiue, épinglé Coup de Coeur des Radios Francophones Publiques et reprend la route.
Flashback : en 2006 sort « Quel effet ? », premier album solo (après la belle aventure « Melon Galia »), auto-produit, enregistré presque tout seul en home-studio, bourré de défauts et attachant pour cela, un vrai « premier album » en somme. Le single « le fossé » lui ouvre la porte des radios et le cœur de bien des auditeurs, touchés par le message épicurien et bienveillant d’une chanson qui clame que « la ligne d’arrivée a perdu de son intérêt »… invitation à la paresse, ode à la pause.
Trois années, une grosse centaine de concerts, beaucoup de rencontres et une signature plus tard, Samir sort donc « Tenter l’atout ». Un album plus ambitieux que le premier, c’est du moins ce qu’on dit quand un artiste élargit ses arrangements (cordes, vents, claviers, en plus du classique guitare/basse/batterie) et ses horizons : une présence plus franche des influences jazz et latines, des rythmiques plus affirmées, une voix plus mûre et plus posée, un jeu de guitare percussif très identifiable, des récurrences sémantiques (le corps, le mouvement, le jeu), une audace dans la citation (la début très Clash et les chœurs très Beatles de « Tenter l’atout » , le clin d’œil appuyé à Lou Reed dans « Regarde-moi », la posture gainsbourguienne de « Tu files », la bulle Bossa Nova qu’est « Non », le danseur-artiste nietzschéen de « Air », etc.) et des duos tout sauf gratuits (le piquant « Velours et mensonges » avec Vanessa Klak et « La voie Rapide », reprise envoûtante d’Olivier Andu chantée avec la non moins envoûtante Auryn).
Samir Barris n’a rien changé à sa plume, qui n’a fait que bonifier. Les compositions sont toujours aussi accrocheuses même quand elles se font plus sophistiquées et le disque enchaîne une série non négligeable de chansons « tubesques ». Les textes au vocabulaire riche et choisi refusent de sacrifier le fond à la forme, ni la forme au fond : pas de « pour la rime » ni de licence « néo-réaliste » ici. Fond et forme se tiennent , s’entremêlent, se relancent, se servent et s’élèvent mutuellement. Et instillent à « Tenter l’atout » ce qu’on pourrait désormais ne plus craindre d’appeler le style « Samir Barris ».